PARIS (AFP) — La cacophonie gouvernementale
autour du projet de loi de finances et de la fiscalité verte, à coups de fuites
savamment orchestrées, irrite les milieux industriels et le Medef et risque
d'entraver les ambitions du ministère du Développement durable. Après les députés UMP la veille, le Medef est
monté au front jeudi pour dénoncer "un énorme désordre en termes de
communication" et exprimer "l'irritation et l'énervement" de ses
membres. "Voir le gouvernement et la majorité jouer au
ping-pong sur des sujets qui sont aussi importants pour certains industriels
c'est irritant", juge Jean-Pierre Clamadieu, responsable du développement
durable au sein de la fédération patronale. "On demande un peu d'ordre et de
méthode... et qu'on mette fin à cette créativité désordonnée",
ajoute-t-il. Enervement partagé au ministère de l'Ecologie
où l'on subit depuis le début du mois les fausses confidences distillées à la
presse par les services du Budget notamment. "Quand vous ouvrez les journaux et écoutez les
radios, vous avez l'impression qu'on va faire du bonus-malus partout et sur
tout", constate Jean-Louis Borloo, contraint de courir les plateaux et les
studios pour démentir les fausses annonces. "On ne fera rien sans concertation
avec les industriels et sans études d'impact", souligne-t-il. "Personne n'est pour un débridage généralisé
et inconséquent, on agira pas à pas", insiste-t-il. Quand il se veut consensuel, il explique
qu'Eric Woerth, le secrétaire d'Etat au Budget, est "dans son rôle" et qu'il a
la charge considérable de "construire le budget de la France". Quand il l'est
moins, il file la métaphore tennistique et entend abattre ses contradicteurs
d'un "six-zéro" à l'arrivée. A l'Ecologie, on ne se gêne pas pour désigner
les services de M. Woerth comme source des fuites: à l'heure où chaque ministère
quête un arbitrage favorable du Premier ministre, lâcher que le dispositif
d'écoprêt à taux zéro en faveur de la rénovation thermique des logements
coûterait un milliard d'euros à l'Etat, c'est "agiter le chiffon rouge pour
effrayer Matignon". L'impression générale qui en résulte ramène la
fiscalité verte à un agrégat de taxes et de ponctions
supplémentaires. Les "annonces successives et brouillonnes"
risquent d'obérer "les chances de rendre ces nouveaux outils fiscaux
populaires", craint l'association Agir pour l'Environnement. Alors que "la fiscalité verte c'est moins
d'impôt et plus de pouvoir d'achat", insiste M. Borloo jeudi dans une interview
au Monde. Le ministère du Développement durable rappelle
l'architecture de la "croissance verte", assise sur trois textes piliers "dont
l'un ne peut se comprendre sans l'autre". La loi Grenelle 1 énonce les grands principes
arrêtés en termes de logement, transports, énergie, biodiversité et santé: le
Parlement l'examinera à partir du 6 octobre. Le projet de loi Grenelle 2 doit
être incessamment transmis au Conseil d'Etat, c'est "la boîte à outils" du
Grenelle, la traduction technique nécessaire à sa mise en oeuvre. Enfin, des
dispositions fiscales dans le Budget 2009, qui seront connues fin septembre,
permettront d'encourager les comportements vertueux et la sobriété
énergétique. Jeudi l'ancienne
ministre de l'Environnement Corinne Lepage s'est portée au secours de Jean-Louis
Borloo: dans un communiqué, son parti Cap 21 a "dénoncé avec force les coups de
butoir orchestrés par une partie de la majorité présidentielle (pour) torpiller
une nouvelle fois les engagements pris à l'issue du Grenelle de
l'Environnement".
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